Est-ce que l’héritage d’une assurance-vie est imposable ?

L’assurance-vie est un placement largement utilisé en France pour préparer la transmission d’un patrimoine. Pourtant, la question de sa fiscalité au moment du décès du souscripteur prête souvent à confusion. Le régime fiscal applicable dépend de plusieurs éléments : la date d’ouverture du contrat, l’âge du souscripteur lors des versements et les sommes concernées. Vous pouvez souscrire un contrat d’assurance vie pour bénéficier d’un cadre fiscal favorable à la transmission.

Le cadre juridique de la fiscalité de l’assurance-vie en France

La fiscalité applicable à une assurance-vie au moment du décès du souscripteur s’appuie sur des règles particulières prévues par le Code général des impôts.

Deux articles encadrent ce régime : l’article 990 I et l’article 757 B. Ces textes fixent les conditions d’imposition des capitaux transmis aux bénéficiaires désignés dans le contrat.
L’article 990 I s’applique aux versements réalisés avant les 70 ans de l’assuré, alors que l’article 757 B concerne ceux effectués après cet âge. Cette distinction a une influence directe sur la manière dont les sommes sont imposées.

L’assurance-vie conserve par ailleurs un statut particulier en droit successoral français. Les capitaux transmis au bénéficiaire d’une assurance vie ne sont pas inclus dans la succession du défunt au sens habituel, ce qui permet de contourner certaines règles de l’héritage, notamment celles relatives à la réserve héréditaire.

Seuils d’exonération et régime d’imposition selon l’article 990 I du Code général des impôts

L’article 990 I du Code général des impôts encadre la fiscalité applicable aux contrats d’assurance-vie alimentés avant les 70 ans de l’assuré. Il stipule les montants exonérés d’impôt et les taux de prélèvement appliqués selon les sommes transmises aux bénéficiaires.

Abattement de 152 500 € par bénéficiaire

Chaque bénéficiaire dispose d’un abattement de 152 500 € sur la part qu’il reçoit. Cet avantage s’applique sans distinction de lien de parenté avec le défunt. Par exemple, si un montant de 450 000 € est réparti à parts égales entre trois bénéficiaires, chacun perçoit 150 000 €, somme non imposée puisqu’elle reste inférieure au seuil d’exonération.

Taux de 20 % jusqu’à 700 000 € au-delà de l’abattement

Lorsque la part reçue dépasse 152 500 €, la fraction comprise entre 152 501 € et 852 500 € est soumise à un prélèvement de 20 %. Ce taux reste inférieur à celui des droits de succession habituels, notamment pour les transmissions entre personnes non parentes. Ainsi, un bénéficiaire recevant 500 000 € d’un contrat d’assurance-vie verra 347 500 € imposés à 20 %, soit un prélèvement de 69 500 €.

Taux de 31,25 % au-dessus de 852 500 €

Pour les sommes dépassant 852 500 €, le taux de prélèvement passe à 31,25 %. Même relevé, ce taux reste souvent plus léger que celui appliqué dans une succession classique. Dans le cas d’un capital de 1 000 000 €, le calcul serait le suivant : 152 500 € non imposés, 700 000 € taxés à 20 % (soit 140 000 €) et 147 500 € à 31,25 % (soit 46 093,75 €). Le total atteint 186 093,75 €, ce qui correspond à un taux global proche de 18,6 %.

Cas des contrats « Vie-Génération »

Certains contrats, appelés “Vie-Génération”, instaurés en 2014, bénéficient d’un traitement fiscal plus favorable. Ils visent à soutenir le financement de l’économie en maintenant un rendement attractif pour l’épargnant. Ces contrats permettent une réduction de 20 % des sommes transmises avant l’application du barème de l’article 990 I. Pour un montant transmis de 1 000 000 €, cette réduction correspond à 200 000 €. Après cette première déduction, l’abattement de 152 500 € s’applique sur les 800 000 € restants, ce qui conduit à une base imposable de 647 500 €, réduisant ainsi le montant prélevé.

Influence de la date de souscription du contrat sur la fiscalité

La date à laquelle un contrat d’assurance-vie a été ouvert détermine les règles fiscales qui s’y appliquent. Les différentes réformes intervenues au fil des années ont en effet instauré plusieurs régimes selon l’ancienneté du contrat.

Contrats ouverts avant le 20 novembre 1991

Les contrats d’assurance-vie souscrits avant le 20 novembre 1991 bénéficient d’un cadre fiscal très avantageux. Les capitaux correspondant aux versements réalisés avant cette date sont totalement exonérés d’imposition successorale, quel que soit leur montant ou l’âge du souscripteur lors des paiements.

Cette exonération complète permet aux détenteurs de ces anciens contrats de transmettre des montants importants sans taxation. Conserver ces contrats reste donc bénéfique pour la transmission d’un patrimoine.

Contrats ouverts entre le 20 novembre 1991 et le 13 octobre 1998

Pour les contrats signés entre ces deux dates, la fiscalité dépend de l’âge du souscripteur au moment des versements. Les primes versées avant 70 ans relèvent du régime prévu par l’article 990 I du Code général des impôts, qui prévoit un abattement de 152 500 € par bénéficiaire avant l’application des taux de 20 % et 31,25 %. Les versements effectués après 70 ans relèvent quant à eux de l’article 757 B, qui prévoit une imposition après un abattement global de 30 500 € sur l’ensemble des primes versées.

Versements réalisés après le 13 octobre 1998

Depuis cette date, tous les versements effectués sur un contrat d’assurance-vie, quelle que soit sa date d’ouverture, relèvent du régime fiscal actuel. Autrement dit, même un contrat ancien est soumis aux règles récentes pour les nouveaux versements, selon qu’ils ont été effectués avant ou après 70 ans.

Cette règle met en lumière l’importance d’une gestion réfléchie des versements au fil du temps, en tenant compte à la fois de l’évolution de la législation et de l’âge du souscripteur. Planifier les apports avant 70 ans permet de bénéficier d’un cadre fiscal plus avantageux en conservant la souplesse propre à l’assurance-vie pour de futurs versements.

Exonérations particulières selon le bénéficiaire

Certains bénéficiaires d’un contrat d’assurance-vie peuvent profiter d’une exonération particulière prévue par la législation française. Ces dispositions ont pour objectif de faciliter la transmission dans des contextes familiaux ou sociaux particuliers.

Conjoint survivant et partenaire pacsé

Le conjoint survivant, tout comme le partenaire lié par un Pacte civil de solidarité, bénéficie d’une exonération complète des droits de succession sur les sommes issues d’un contrat d’assurance-vie. Cette exonération s’applique sans limite de montant et indépendamment de l’âge du souscripteur au moment des versements. Introduite par la loi TEPA de 2007, cette mesure vise à préserver les conditions de vie du conjoint ou du partenaire survivant et s’inscrit dans une politique d’allègement fiscal au sein du couple. En revanche, les concubins ne sont pas concernés et restent soumis au régime fiscal général applicable à l’assurance-vie lors d’un décès.

Frères et sœurs remplissant certaines conditions

Dans des situations particulières, un frère ou une sœur du défunt peut également bénéficier d’une exonération totale sur les sommes perçues au titre d’un contrat d’assurance-vie. Pour y avoir droit, il faut être célibataire, veuf, divorcé ou séparé de corps au moment du décès, avoir plus de 50 ans ou avoir une infirmité rendant impossible l’exercice d’une activité professionnelle, et avoir résidé avec le défunt durant les cinq années précédant le décès. Cette disposition vise à protéger les fratries vivant sous le même toit, souvent pour des raisons économiques ou de santé, afin d’éviter une charge fiscale supplémentaire qui mettrait en péril leur stabilité.

Associations reconnues d’utilité publique

Les associations disposant du statut d’utilité publique bénéficient elles aussi d’un traitement fiscal favorable lorsqu’elles sont désignées comme bénéficiaires d’un contrat d’assurance-vie. Elles ne sont pas soumises aux droits de mutation sur les montants reçus. Cette mesure encourage les donations et les legs au profit d’organisations caritatives ou d’intérêt général. Elle permet aux souscripteurs d’orienter une partie de leur patrimoine vers une cause en profitant d’un cadre fiscal avantageux. Il est toutefois recommandé de vérifier que l’association choisie détient bien la reconnaissance d’utilité publique avant de la mentionner comme bénéficiaire dans le contrat.

Déclaration et paiement des droits d’assurance-vie

La transmission des capitaux d’assurance-vie entraîne des obligations fiscales et administratives pour les bénéficiaires. Bien connaître ces démarches permet d’assurer une conformité avec la loi et d’éviter tout risque de pénalité.

Formulaire 2705-A pour les contrats soumis à l’article 757 B

Lorsque le contrat d’assurance-vie entre dans le champ de l’article 757 B du Code général des impôts, c’est-à-dire pour les versements effectués après les 70 ans du souscripteur, les bénéficiaires doivent remplir le formulaire 2705-A. Ce document, appelé « Déclaration partielle de succession », doit être adressé au service des impôts du lieu de résidence du défunt.

Ce formulaire regroupe les principales informations relatives au contrat, comme l’identité du souscripteur décédé, les coordonnées de l’assureur, le montant des versements réalisés après 70 ans ainsi que l’identité des bénéficiaires. Il est indispensable de le compléter avec soin, car il sert de base au calcul des droits éventuels. Les bénéficiaires doivent également respecter les délais de dépôt pour éviter tout retard susceptible d’entraîner des majorations ou des intérêts.

Délais de déclaration et de règlement auprès de l’administration fiscale

Les délais applicables pour la déclaration et le paiement des droits suivent en principe ceux prévus pour les successions ordinaires. En métropole, la déclaration doit être déposée dans un délai de six mois à compter du décès du souscripteur. Dans les départements d’outre-mer, ce délai est porté à six mois lorsque le décès a eu lieu dans le département et à un an dans les autres cas.

Le paiement des droits intervient au moment du dépôt de la déclaration. En cas de retard, des intérêts et pénalités peuvent être appliqués, leur montant variant selon la durée écoulée. Le respect de ces délais reste donc indispensable, et il est recommandé de contacter le service des impôts en cas de difficulté afin d’éviter toute sanction.

Rôle de l’assureur dans le prélèvement à la source

Depuis 2018, les compagnies d’assurance doivent effectuer un prélèvement à la source sur les produits des contrats d’assurance-vie. Cette mesure concerne les contrats détenus depuis plus de huit ans lorsque les versements dépassent 150 000 €. Cela évite au bénéficiaire d’avoir à avancer les sommes dues, mais ces prélèvements sont une avance sur l’imposition finale. Les montants reçus doivent être déclarés l’année suivante dans la déclaration de revenus, ce qui peut conduire à un complément d’impôt ou à un remboursement selon la situation fiscale du bénéficiaire.

L’assureur doit informer le bénéficiaire des montants prélevés et lui transmettre les justificatifs nécessaires à sa déclaration. Cette information permet de vérifier l’exactitude des retenues et de préparer la déclaration fiscale dans de bonnes conditions.

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